C’était à New York, il y a quelques années déjà. La journée avait bien commencé, mon pote avait percuté Laetitia Casta près de Time Square et lui avait lancé un mythique « Arrête tes feintes, pourquoi tu me parles en anglais je sais que t’es française » pendant qu’elle courait vers sa limousine garée de l’autre côté de la rue et que son garde du corps s’approchait de nous d’un air faussement menaçant. Autant vous dire que j’étais psychologiquement préparé à passer une journée cheloue, ya des jours comme ça où tu sais que tout peut arriver et que tu vas avoir des histoires improbables à raconter à tes potes qui te traiteront évidemment de menteur.
Enfin bref, je me rappelle plus exactement comment ça c’est passé (enfin si, mais c’est des dossiers qui mettent en péril mon existence donc laissez moi faire semblant), mais je me suis retrouvé assis à l’avant d’un Hummer gris métal avec le premier album d’Alicia Keys à fond, une MILF moitié hindou / moitié philippine / totalement atomique derrière le volant. Pour vous faire une idée, imaginez Kimora Simmons quand elle était au top, multipliez son potentiel physique par 10 et ajoutez lui un accent franco-américain magique. Presque 40 ans mais elle semblait en avoir 25 derrière ses lunettes Chanel, un corps impressionnant mis en valeur par un bronzage à la hauteur de ses vacances passées aux Seychelles, le genre à gagner haut la main toutes les bastons de regard que tu aurais l’inconscience d’engager avec elle. Forcément, j’ai mis mes lunettes de soleil moi aussi, pour pas qu’elle capte mon expression de petit chiot en train de se pisser dessus face à cet engin, et en espérant garder le peu de confiance en moi qu’il me restait après notre rencontre avec Laetitia un peu plus tôt. Et aussi pour me la raconter à mort parce que soyons francs, c’est pas le genre de situation qui t’arrive souvent donc autant en profiter à fond comme dans un reportage de Zone Interdite.
Comme je suis un gentleman, je l’écoute parler pendant qu’elle conduit, et ça m’arrange bien parce que je suis trop occupé à garder un semblant de poker face et de sérénité. Elle m’explique que la dernière fois, pour prouver à son mari qu’elle aussi pouvait être excitante, elle lui a fait une lapdance sur la jambe gauche tandis qu’une strippeuse du Scores (les vrais savent) s’occupait de la jambe droite, ambiance battle en sous vêtements rouge et parfums qui donnent le vertige. Le mari en question n’est jamais à la maison (sourire), il travaille tout le temps et il sort tous les soirs parce qu’il « s’occupe des relations publiques d’une marque de montre de luxe, Audemars-Piguet je sais pas si tu connais? D’ailleurs en parlant de soirée il paraît que Jay-Z veut lancer son club, c’est cool, enfin un endroit où on sera ultra VIP, je suis impatiente ». Et là, j’ai tiqué, vous imaginez bien. « Euh, t’entends quoi par « on sera ultra VIP dans le club de Jay-Z », je comprends pas trop », en dissimulant tant bien que mal la grosse goutte de transpiration sur ma tempe malgré la clim à 12°. « Jay-Z et Damon Dash sont des amis de longue date de mon mari, ils sont fans d’Audemars-Piguet parce que les montres coûtent 100 000 dollars et que c’est pas très répandu, donc à force de se voir, ils sont devenus potes ». Ah. Ok. Bon. Hum. Sinon? Mais quand tu dis… Euh. On disait quoi là déjà?
Et donc, elle continue de me raconter la fois où elle était assise à côté d’Alicia Keys et qu’elle se moquait de sa veste en fourrure horrible et de son gros cul parce qu’elle ne l’avait pas reconnue (« j’espère qu’elle ne parle pas français, la honte sinon »), elle me montre le prototype de la prochaine Royal Oak pour femme à je sais pas combien de milliards de dollars mais je m’en fous, je l’écoute plus (enfin si un peu quand même, faut pas déconner). « Mais alors si tu connais Jigga et Dame (genre je les connais aussi) depuis longtemps et que tu manges souvent avec eux, t’as dû passer des soirées avec Aaliyah?… ». Silence. Elle prend une grosse inspiration, retient une larme et me répond oui. On parlerait pas d’Aaliyah, j’aurais éclaté de rire et je l’aurais charrié en disant que c’était pas sa soeur non plus, faut pas se mettre dans des états comme ça sérieux (attends, c’était pas ta soeur quand même? Ouf, tu m’as mis le doute, j’ai flippé là). Mais non, j’ai pas eu la force.
Je n’ai que de vagues souvenirs de la suite (elle avait un décolleté trop plongeant qui a eu raison de ma concentration), mais à en croire ce qu’elle me racontait, Aaliyah était une fille super simple, discrète, douce et vraiment humble. Le style à rester dans un coin pendant tout le repas sans vouloir se mettre en avant, à être à l’écoute des autres, et à débarrasser la table à la fin (wahou). Et surtout, elle avait un visage encore plus dingue en vrai, aussi incroyable que ça puisse paraître. Elle était déjà morte à l’époque, donc je ne saurais pas déterminer qu’elle est la part d’exagération dans tout ça (parce qu’on a toujours tendance à embellir les souvenirs), mais j’ai eu envie d’y croire. Peut être parce que je savais au fond de moi que je ne pourrai plus jamais être aussi proche d’elle que je l’ai été à cet instant, que je n’aurai jamais l’opportunité d’aller à l’un de ses concerts ou de faire une blague pourrie pour tenter de la faire rire après l’avoir percutée dans la rue. Et qu’il faudra attendre une prochaine vie pour espérer la recroiser.
Aaliyah Dana Haughton, 16.01.1979 – 25.08.2001, RIP
Et au final tu l’as rencontré Hova ?
de nouveau en Deuil…
Pas tout compris l’histoire mais si j’ai une fille un jour inchallah, ce sera aaliayah !
Oh lala, ton article il est magnifique!
??? Je le trouve pas terrible moi cet article…
Histoire vraie?? en tout cas très bel article…so soulful…
Moi j’me demande encore « à quel moment tu t’es retrouvé avec une riche bombe atomique à NYC et que tu sais pas comment t’as attéri là… »
[…] il y a eu 2Pac (Je refuse de célébrer l’anniversaire de la mort de 2Pac) et aussi Aaliyah (Le jour où j’ai failli rencontrer Aaliyah). A ce rythme là nous n’aurons bientôt plus d’idoles, juste des hommages annuels à […]