Ils s’appellent Citizen Prime, Black Owl, Mr Invisible, Green Scorpion, Terrifica, Ghost ou Silver Dragon, et défendent la justice à la nuit tombée, quand le crime se déverse dans les ruelles aux lumières blafardes. Et quand le matin nettoie les atrocités de la nuit, ils redeviennent courtier en assurance, ouvrier, homme d’affaires ou webmaster. On les appelle les Reals, et leur nombre ne cesse de croître, au point d’avoir établi un Registre Mondial des Super Héros. Sauf que contrairement aux super héros de comics, les Reals sont des personnes réelles, comme vous et moi (enfin, surtout comme moi je pense).
Les règles sont simples: défendre spontanément et bénévolement le Bien, ne pas porter d’arme à feu ou d’arme blanche (pour ne pas se faire arrêter), se trouver un nom digne des meilleurs comics de série Z et se créer un costume (qui bien entendu ne viole pas les droits des personnages Marvel ou DC). Mr Invisible a tellement travaillé le sien, que sa couleur grisâtre lui a permis de rester dissimulé dans la pénombre pendant qu’un ivrogne lui pissait dessus. Pour les plus riches, comme Citizen Prime, business man de 41 ans, le costume peut coûter jusqu’à 4000 dollars (masque, cape, et pistolet à impulsions électriques fournis). Le pouvoir de se dissimuler derrière une fausse identité n’a pas de prix.
Parce qu’au final, c’est bien de ça dont il est question. D’hommes et de femmes (plus de 200 répertoriés à ce jour) qui ont voulu un jour (enfin, un soir plutôt) sortir de leur routine et combattre les injustices à leur manière. Arts martiaux, conseils glanés sur le web: tous les moyens sont bons pour envoyer les petites frappes derrière les verrous, ou pour aider les gens à changer un pneu crevé. Mais ils ne crient pas leurs exploits sur les toits, car les vrais super héros ont le triomphe modeste.
Boostés par la campagne présidentielle d’Obama, qui a donné des ailes à tout le monde, les Reals ont commencé à faire leur apparition lorsque les tours jumelles new yorkaises se sont éteintes en 2001. Alors que tout l’entertainement était en deuil et que Spider-Man se faisait censurer une séquence où il capture un hélicoptère dans une toile tissée entre les tours du World Trade Center, les super héros de la vraie vie ont voulu prendre la relève, et ont revêtu leur costume cousu main. Parce qu’être un super héros, ce n’est pas si dur. C’est le retour à l’autre identité, la vraie, qui est difficile.
Simple prétexte pour sortir tard la nuit, sentir l’air frais sur son visage et chercher la poussée d’adrénaline en arpentant les parcs de Salt Lake City à la recherche de dealers armés comme la Black Monday Society (une fraction plus violente des Reals), ou véritable envie de venir en aide aux filles bourrées qui se font harceler alors qu’elles sortent de club et d’en terminer avec les super méchants, dont le Registre prédit la fin proche? La réponse doit se trouver quelque part entre les deux, entre un costume kevlar et un costume cravate.
Car comme dans tout bon comics post 80s, c’est à dire après la consécration du Watchmen d’Alan Moore ou encore du Dark Knight de Frank Miller, les héros sont torturés, tiraillés, en quête d’eux mêmes et parfois suicidaires. Ils sont humains, en fait. Alors que le comics se rapproche de la réalité, la réalité se rapproche du comics. Et lorsque les deux se rencontrent et s’entrechoquent, ça donne les Reals, et le vrai quotidien. Des héros qui travaillent la journée, qui enfilent leur costume trop tard et restent chez eux parce que la police est déjà là, qui se prennent des coups de poing dans la tête par les petites amies des voyous, qui se font interner en hôpital psychiatrique parce qu’ils oublient qu’ils ne savent pas voler, qui ne patrouillent pas l’été parce que leur costume gratte, et qui s’ennuient à mourir quand il pleut et que les dealers restent au chaud chez eux. Et surtout, qui redoutent la concurrence d’une équipe bien mieux organisée: la Police.
Et pendant ce temps, dans notre continuité, les adaptations cartonnent mais Common ne sera pas Green Lantern au cinéma parce que les studios préfèrent raconter les aventures de Hal Jordan (le Green Lantern caucasien) plutôt que celles de John Stewart (le Green Lantern noir), IAM espère toujours lancer des boules de feu dans leur BD et moi, j’attends encore chaque nuit que le Yellow Signal déchire les nuages pour enfiler mon costume et sauver la veuve et l’orphelin. Alors la prochaine fois que vous croiserez un super héros costumé, ne ricanez pas, parce qu’il y en a forcément un qui dort au fond de vous. Et il pourrait se réveiller plus tôt que prévu.
J’y crois pas, c ouf, barj, flippant.
Ca tue. Je réfléchis dès ce soir à ma nouvelle identité secrète.
[…] cheap, et bien moi non (même si je trouve ça naze). Je vous avais bien dit que c’était la mode des super héros en ce […]
[…] y a les gens ordinaires qui veulent se transformer en super héros, et les super héros qui veulent être des gens ordinaires. Au milieu de tout ça, il y a aussi les […]